Une action en justice initiée en 2020 auprès du tribunal administratif d’Helsinki par une société de gestion française pourrait éventuellement aboutir à une révision du régime de taxation des fonds d’investissement en Finlande. Le litige, actuellement renvoyé devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) pour une demande de décision préjudicielle, oppose une société civile de placement immobilier (SCPI) gérée par un gestionnaire d’actifs français investissant dans des biens immobiliers situés en France et dans les pays de la zone euro au fisc finlandais. En juin 2019, la SCPI prévoit de signer un contrat portant sur l’achat d’actions de deux sociétés anonymes immobilières mutuelles finlandaises, lesquelles sont propriétaires d’immeubles utilisés par des commerces de détail. Si cette acquisition se concrétise, la SCPI exercera l’activité de location d’immeubles en Finlande mais avant de signer le contrat, elle demande à l’administration fiscale de «rendre une décision préalable concernant les exercices fiscaux 2019 et 2020». Le fisc finlandais lui répond que si elle peut être exonérée d’impôts pour 2019, elle ne le sera pas pour l’exercice fiscal 2020. En cause, l’application d’un article – article 20 – de la loi locale relative à l’impôt sur le revenu. Société anonyme ou véhicule comparable à un fonds finlandais ? Pour le fisc finlandais, au vu de son prospectus, la SCPI est assimilable à une société anonyme finlandaise. Elle ne rentre pas dans les critères de la forme juridique d’un fonds d’investissement spécial au sens de l’administration fiscale locale, comme le requiert un alinéa de l’article20 de la loi relative à l’impôt sur le revenu. Ce que conteste en justice la SCPI française. Selon elle, l’article concerné est contraire au droit de l’UE dans la mesure où seuls les fonds créés par contrat peuvent être considérés comme des fonds d’investissement spéciaux exonérés de l’impôt sur le revenu. La SCPI se revendique, elle, comme étant«à tous égards un opérateur comparable à un fonds d’investissement finlandais». L’avocat général de la CJUE, Henrik SaugmandsgaardØe, a rendu ses conclusions mercredi 6 octobre. Il conclut que le régime finlandais de taxation des fonds d’investissement étrangers présente une restriction de la liberté de mouvement des capitaux prévue par le traité sur le fonctionnement de l’UE. Selon l’avocat général, un fonds d’investissement ouvert domicilié en France doit être traité de la même façon, sur le plan fiscal, que des fonds d’investissements par contrat finlandais, peu importe les différences sur le plan légal. Aucune raison d’intérêt public ne saurait justifier une différence de traitement. Jugement attendu d’ici la fin de l’année D’après l’analyse de l’affaire menée par le cabinet KPMG, si la CJUE se range du côté des conclusions de l’avocat général, «cela pourrait être une opportunité pour les fonds d’investissement non-finlandais d’obtenir un remboursement de dividendes précédemment retenus à la source par le fisc local». «Les conclusions de l’avocat général sont une extension logique d’un précédent jugement rendu par la CJUE en 2021 concernant le traitement fiscal d’un investisseur finlandais dans un fonds d’investissement étranger. Dans ce jugement, la cour a jugé que le revenu perçu d’un fonds d’investissement étranger ne devait pas être taxé différemment de celui d’un fonds d’investissement par contrat finlandaiscar les fonds sont comparables malgré des formes légales différentes », explique KPMG, qui voit un régime de discrimination indirecte dans le traitement de taxation actuel différent pour les fonds locaux, exonérés d’impôt, et étrangers en Finlande. Selon le cabinet, les professionnels de l’imposition en Finlande estiment que le jugement devrait tomber d’ici la fin de l’année et certains voient la CJUE adopter un point de vue similaire à celui de l’avocat général. «Par conséquent, les fonds non-résidents constitués sous la forme de société (Sicav par exemple) doivent envisager de déposer des demandes de remboursement de la retenue à la source en Finlande à titre préventif, puis d’interjeter appel ou de prendre d’autres mesures appropriées si l’administration fiscale finlandaise rejette ces demandes de remboursement», conclut KPMG dans son analyse du cas finlandais.