En matière d’investissement socialement responsable en France, la gestion dédiée a pris le pas sur la gestion collective. Ainsi, en 2008, les encours en gestion déléguée et interne hors épargne salariale - autrement dit la gestion dédiée - ont fait un bond en avant de 76 % à 15,5 milliards d’euros, contre 8,8 milliards d’euros fin 2007, sur un total de 29,9 milliards d’euros d’encours ISR sur le marché français, selon les dernières statistiques de Novethic. Dans le même temps, la gestion collective ouverte (FCP et Sicav) en ISR n’a progressé que de 6 % à 11,1 milliards d’euros. «Pour la première fois depuis que nous réalisons notre enquête annuelle, la gestion dédiée devance ainsi la gestion collective (55 % contre 45 %)», souligne Dominique Blanc, analyste chez Novethic. La croissance de la gestion dédiée s’explique avant tout par le fait que le marché de l’ISR est dominé par les investisseurs institutionnels. Et par le fait que ces derniers recherchent de plus en plus à s’approprier ce concept, en adoptant une gestion sur mesure. En témoigne le choix d’Agrica de convertir plus de 3 milliards d’euros en gestion interne à l’ISR. Parallèlement, les nouveaux mandats en gestion déléguée sont passés de 4,8 milliards d’euros à 6,7 milliards. Les principaux investisseurs institutionnels en gestion ISR dédiée sont les fonds de pension et de réserve, les caisses de retraite et de prévoyance et les compagnies d’assurance et mutuelles. Les groupes religieux et organisations caritatives, qui étaient pionniers en matière d’ISR, ne représentent en revanche plus que 4 à 3 %. Une baisse liée à la montée en puissance des nouveaux acteurs, ainsi qu'à leur poids financier, plutôt qu'à un retrait des clients historiques. Les actifs dédiés sont investis quasi exclusivement dans la zone euro (90 %) et sont très majoritairement des obligations (71 %), émises aux deux tiers par des Etats, note Novethic. Les actions ne représentent que 24 % du total. Concernant les stratégies ISR mises en oeuvre dans le cadre de la gestion dédiée, la sélection ESG, basée sur l’analyse des pratiques environnementales, sociales et de gouvernance des émetteurs, reste omniprésente. Mais Novethic observe que les exclusions normatives, qui consistent à exclure des émetteurs en violation avec des normes et conventions internationalement reconnues, sont plus importantes qu’en gestion collective, puisqu’elles sont mises en œuvre pour 48 % des encours. Cette montée en puissance de la gestion dédiée devrait se poursuivre, estime Dominique Blanc, au vu du dynamisme des investisseurs institutionnels en matière d’ISR. Les institutionnels représentent en effet 75 % du marché avec 22,5 milliards d’euros d’encours ISR, soit une hausse de 54 % sur un an. Les encours gérés pour le compte des investisseurs particuliers (hors épargne salariale) sont en revanche en repli de 13 %. Anne-Catherine Husson-Traoré, directrice général de Novethic, explique cela par le fait qu’il n’y a pas eu encore une vraie sensibilisation côté réseaux bancaires et compagnies d’assurances, ce qui devrait peut-être bientôt changer… (lire article du jour sur le label ISR de Novethic). En tout cas, le poids grandissant de l’institutionnel explique aussi le basculement qui s’est opéré en 2008 en termes de classes d’actifs. Alors qu’en 2007 les actions constituaient la moitié des encours, on constate un glissement du marché vers les produits de taux. Les obligations, avec une croissance de 50 %, et le monétaire, qui a été multiplié par quatre en un an, représentent conjointement deux tiers des encours à fin 2008, indique Novethic. En 2008, malgré la crise, les encours ISR sont passés de 21,8 milliards d’euros à 29,9 milliards, soit une hausse de 37 %.