2020, année noire pour les dividendes

Selon le décompte de L’Agefi, un tiers des groupes du SBF 120 ont coupé leur dividende. 20 milliards d’euros ont disparu.
Olivier Pinaud

Sous pression depuis l'éclatement en Europe de la crise sanitaire, les dividendes lâchent prise. Face à l’impact économique du Covid-19 et à la violente récession qui s’annonce pour 2020, les entreprises ont une priorité : mettre le maximum de cash en sécurité. Les suppressions ou baisses de dividendes se sont ainsi multipliées ces dernières semaines, au point d’atteindre des montants vertigineux.

Selon le dernier décompte de L’Agefi effectué au 13 avril, 41 groupes du SBF 120, soit un tiers de l’indice de la Bourse de Paris, ont touché à leur dividende. Ce chiffre ne tient pas compte de cas comme Peugeot, Axa ou bien encore Danone qui ont prévu de se pencher dans les prochaines semaines sur leur politique de rémunération des actionnaires.

Au 13 avril, ce sont ainsi un peu plus de 20 milliards d’euros de dividendes qui ont été annulés sur le SBF 120, en tenant compte des annonces des banques françaises. En 2019, les groupes de l’indice avaient payé un total de 66 milliards d’euros de dividendes. La coupe en valeur serait donc là aussi proche du tiers.

L’impact final pourrait être moindre si les banques venaient, en fonction de l’évolution de la crise, à verser une partie de leurs dividendes en fin d’année: la recommandation actuelle de la Banque centrale européenne le leur permettrait. Les banques sont parmi les plus gros payeurs de dividendes du SBF 120, avec 3,8 milliards pour BNP Paribas ou 2 milliards pour Crédit Agricole SA.

Les dividendes des majors tiennent bon

Le manque à gagner pour les actionnaires s’annonce énorme. En épluchant les données des cinq dernières décennies, les analystes d’UBS ont calculé que les dividendes multiplient par 0,4 fois la baisse des résultats en période de récession. En 2000, lors de l’éclatement de la bulle internet, les bénéfices des entreprises européennes avaient ainsi baissé de 20% et les dividendes avaient plié de 12%. En 2009, le plongeon des bénéfices avait atteint 46%, celui des dividendes de 31% (-12% en retirant les financières). Les dividendes sont donc finalement plus résistants et moins volatils aux chocs que les bénéfices, ce que confirment les analystes de Morgan Stanley.

Mais «cette fois, l’impact pourrait être plus élevé», préviennent les analystes d’UBS : si les banques, qui assurent à elles seules 15% des dividendes du MSCI Europe, soit la plus forte proportion de l’indice, «suppriment leurs dividendes et si les autres secteurs annoncent des baisses de dividendes similaires à celles de la crise financière, le montant total des dividendes pourrait plonger de 42%».

La chute pourrait même atteindre 52% si les groupes pétroliers venaient eux aussi à tailler dans leurs dividendes. Jusqu’à présent, les majors ont simplement suspendus leurs programmes de rachats d’actions. UBS remarque d’ailleurs que lors des précédentes crises, les groupes pétroliers avaient préservé leurs dividendes. Autre gros pourvoyeur de rémunérations actionnariale, la pharmacie (10,2% du MSCI Europe) paraît également protégée dans le contexte actuel.

L’évaporation brutale des dividendes a déjà fait des dégâts sur les marchés. Selon Bloomberg, BNP Paribas et la Société Générale auraient essuyé de lourdes pertes ces dernières semaines dans leurs activités de produits structurés indexés sur les dividendes. BNP Paribas aurait ainsi perdu 100 millions d’euros dans les futures sur dividendes. Ces options, qui permettent d’investir sur les prévisions de dividendes ou de se couvrir, ont été divisées par deux en seulement quelques jours le mois dernier avec la crise du Covid-19.

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