Bercy doit compenser le coût des litiges fiscaux à venir sur les dividendes

Le Conseil constitutionnel a annulé entièrement la taxe de 3%. Bercy veut instaurer un nouvel impôt en 2019, pour faire face aux remboursements demandés par les entreprises.
Ivan Best
Bercy 1 ministère des finances AFT
Le nouvel impôt que Bercy veut créer viserait notamment les grandes entreprises.  -  Crédit Fotolia

C’est tranché. Le Conseil constitutionnel a totalement invalidé vendredi la taxe de 3% sur les dividendes instaurée en 2012, ouvrant la voie à un remboursement par le fisc des sommes versées à ce titre par les entreprises. Saisi en juillet par le Conseil d’Etat d’une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil constitutionnel a estimé vendredi que cette taxe méconnaissait les «principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques» et jugé dès lors que la taxe était «contraire à la Constitution».

C’est la Cour de Justice européenne qui avait entamé en mai les hostilités, affirmant qu’il n’était pas possible de surtaxer des bénéfices distribués par une société mère française, dès lors qu’ils provenaient de dividendes versés par une filiale européenne. Le Conseil d’Etat avait ensuite suggéré une parade, destinée à mettre la législation française en conformité avec l’Europe : pourquoi ne pas soumettre à la taxe les seules redistributions de dividendes provenant d’une filiale française ?

Le Conseil constitutionnel a jugé une telle distinction selon la nationalité des sociétés non conforme à la Constitution, car méconnaissant les principes d’égalité devant l’impôt. Il n’est pas possible d’établir «une différence de traitement entre les sociétés mères, selon que les dividendes qu’elles redistribuent proviennent ou non de filiales établies dans un État membre de l’Union européenne autre que la France».

300 millions d’euros provisionnés

La décision aura un coût budgétaire important pour l’Etat. Pas seulement en raison de l’annulation de cette taxe, largement anticipée : le gouvernement avait pris les devants en la supprimant dans le projet de loi de finances 2018, conformément à une promesse de campagne d’Emmanuel Macron. Ce manque à gagner pour les finances publiques -1,9 milliard d’euros par an - est en fait compensé par la transformation du CICE en baisse de charges, qui alourdit mécaniquement l’impôt sur les sociétés, et fait donc rentrer des recettes supplémentaires dans les caisses de l’Etat. Selon Bercy, cette bascule CICE/baisse des charges ferait gagner 5 milliards d’euros aux finances publiques.

Le gouvernement ne cherchera donc pas à compenser ce manque à gagner. En revanche, il veut financer un autre coût à venir, celui du remboursement de la taxe déjà versée par les entreprises. Fortes des décisions de la justice européenne et du Conseil constitutionnel, celles-ci vont exiger qu’on leur rende les sommes payées au fisc au titre d’une taxe «illégale». Le coût sera d’autant plus important que c’est toute la taxe qui a été annulée.

Une provision de 300 millions d’euros a été prévue à cet égard dans le budget 2018. Mais les sommes iront bien au-delà par la suite. Plus de 4 milliards auraient été réclamés, un montant qui pourrait grimper encore. Le nouvel impôt, dont le gouvernement a souligné qu’il serait temporaire, viserait notamment les grandes entreprises, puisque ce sont elles qui bénéficieront le plus des remboursements. Une taxe additionnelle à la C3S a un temps été envisagée. Mais le Medef fait tout pour obtenir que les groupes de taille importante ne soient pas les seuls à payer. Le Conseil d’Etat devra se prononcer début 2018 sur la question de ce remboursement. Le nouvel impôt entrerait donc en vigueur en 2019.

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