L’AMF s’inquiète du retard pris par l’Union des marchés de capitaux

L’industrie européenne de la gestion est pénalisée dans son développement international par le respect des règles locales et européennes.
Bruno de Roulhac
AMF Autorité des Marchés financiers
L’AMF a présenté jeudi son rapport annuel.  -  Photo DR.

La crise de 2020 nécessite de «revisiter en profondeur certains sujets», a déclaré Robert Ophèle, président de l’Autorité des marchés financiers (AMF), à l’occasion de la présentation jeudi du rapport annuel du régulateur.

S’il se félicite de la montée en puissance de l’actionnariat individuel, plus jeune et plus actif, avec 60 millions de transactions en 2020 contre 25 millions les années précédentes, le président de l’AMF insiste sur la nécessité de s’inscrire dans le long terme, sans prises de risques excessifs, alertant sur les instruments à fort effet de levier ou sur des tarifications attractives, et insistant sur l’importance de la qualité des conseils aux clients.

L’AMF s’interroge sur des mécanismes de marché excessifs et contrariés. Notamment sur l’interdiction des ventes à découvert, instaurée par seulement six pays de l’Union européenne, et sur la fragilité des fonds d’investissement, nécessitant de revisiter la pertinence du cadre réglementaire et des méthodes de supervision et de réfléchir à la mise en place d’outils contracycliques.

Défendant l’intégrité et la transparence du marché, le régulateur se réjouit qu’un dialogue ait permis de trouver une solution dans le dossier Veolia-Suez. Le caractère collectif du travail des services de l’AMF et du Collège, «est pour moi un gage de l’impartialité et de la neutralité et de l’indépendance de l’AMF», explique Robert Ophèle.

Réflexion sur la «record date»

Avec l’instauration des assemblées générales à huis clos, «si on veut pouvoir voter en direct, il faut sécuriser le process et discuter s’il ne faut pas avancer la ‘record date’. Elle est plus précoce à l’étranger qu’en France, confie Robert Ophèle. J’ai bon espoir d’expérimentations cette année, avant un recours très significatif attendu pour les AG 2022».

Si la finance durable se développe, l’AMF attend des précisions sur l’information non financière des émetteurs et le rôle des agences de notation, sur l’information non financière du secteur financier, et sur la normalisation des produits financiers verts. Elle trouve le nouveau cadre juridique (SFDR) confus «en particulier sur le périmètre exact des produits relevant de son article 8, c’est-à-dire ceux mettant en avant des caractéristiques environnementales et sociales, ou relevant de l’article 9 dont l’objectif est l’investissement durable».

Le régulateur s’inquiète du retard pris par l’Union des marchés de capitaux et par un après-Brexit qui se dessine trop lentement. Une cinquantaine de sociétés de gestion ou d’investissement ont choisi Paris, mais l’industrie européenne «est en position de faiblesse sur son marché domestique, regrette Robert Ophèle. Elle est pénalisée dans son développement international car elle doit respecter les règles locales en plus de celles de l’UE, empêchant de faire émerger un marché financier européen efficace et des acteurs européens de dimension internationale».

Des moyens financiers insuffisants

Leitmotiv annuel : l’AMF se plaint de nouveau de son manque de moyens qui la contraint à réduire ses ambitions, alors qu’elle a accéléré sa digitalisation et l’exploitation des données (111 milliards de données de marché dans sa plateforme ICY). En pertes chaque année depuis 2012, le régulateur cumule 33 millions d’euros de pertes sur 2012-2021, pour 100 millions reversés au budget de l’Etat. En outre, elle estime que sa filière répressive est «sous pression», rappelant que sans accès aux données de connexion - les «fadettes» - la privera d’éléments essentiels pour les délits d’initiés. Robert Ophèle s’inquiète aussi de la multiplication des recours contre les décisions de la commission des sanctions, et contre les décisions des services ou du Collège. Ils allongent les délais et accroissent la charge de travail.

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