Mario Draghi invite les investisseurs à changer de repère
Philippe Mudry
Il est des statu quo qui peuvent cacher de vrais changements : la BCE a maintenu ses taux hier et consacre toujours à son objectif de 2% au moins d’inflation l’essentiel de son attention. Mais les investisseurs peuvent désormais modifier leur grille d’analyse sur les marchés européens.
Primo, Mario Draghi a revendiqué la victoire sur la déflation. « Le risque a largement disparu », dit-il. En conséquence, la mention sur la possibilité de recourir à de nouveaux outils pour le conjurer a aussi disparu de son discours.
Deuxio, l’inflation voit son objectif relevé pour 2017, de 1,3 à 1,7%. Ce n’est pas négligeable, même s’il demeure au-dessous de l’objectif de moyen terme et que les perspectives pour 2018 et 2019 restent inchangées.
Tertio, les variables-clés à surveiller changent : il ne s’agit plus de scruter le niveau des prêts à l’économie– les opérations ciblées de refinancement à long terme des banques ne sont plus à l’ordre du jour – mais plutôt le redressement des salaires.
Le propos là encore est sans équivoque : « C’est le pivot qui conditionne une remontée auto-entretenue de l’inflation. C’est la variable clé ». Les investisseurs sont bien invités à changer de repère.
C’est d’ailleurs ce qu’ils font. Les taux européens étaient en hausse hier, y compris les taux allemands à 10 ans qui sont à leur plus haut niveau d’un mois. Quant à l’euro, il a remonté d’un demi-pourcent.
Le temps de gérer la sortie de l’assouplissement quantitatif s’approche pour la BCE.
Si son président y parvient sans heurt, en pilotant une remontée des taux graduelle, un moteur puissant pourrait s’allumer pour les bourses européennes. Surtout si le péril populiste est finalement conjuré dans les urnes.