La BCE dernier des Mohicans
La BCE va jouer le rôle du dernier des Mohicans en matière
d’orthodoxie monétaire. Tour à tour, les Etats-Unis, le Japon et la Grande
Bretagne ont modifié les critères sur lesquels leur politique monétaire doit
être fondée, en donnant moins de poids à l’inflation et davantage à la
croissance et à l’emploi. Tokyo assume depuis la fin 2012 une politique
expansionniste forcenée, qui vise explicitement à « reflater »
l’économie. La Fed de son côté a ajouté un objectif d’emploi à sa réflexion, en
excluant toute remontée des taux tant que l’inflation ne dépassera pas 2,5%
mais aussi tant que le chômage ne sera pas inférieur à 6,5%. Hier Londres a modifié
son approche. Le Chancelier de l’échiquier George Osborne a proposé un
changement de mandat de la Banque d’Angleterre pour lui donner plus de
souplesse dans les temps de récession. Son idée est proche de celle de la
Fed : il s’agirait d’autoriser la Banque d’Angleterre à s’engager sur un
horizon de maintien de taux bas en fonction d’objectifs de croissance et
d’emploi. Ce recul relatif mais important du poids de l’inflation comme critère
monétaire central est aux antipodes de la pensée européenne sur le sujet. Les
Allemands en font un « casus belli ».Cette divergence de fond n’est
pas de bon augure : elle ne facilitera pas le dialogue entre banquiers
centraux des pays développés dont la coopération a été si utile dans
l’apaisement des tensions nées de la crise financière.